Une situation contrastée : les entreprises se portent bien, mais doivent faire face à la crise et aux difficultés de recrutement
Chaque année, AXA publie le baromètre des préoccupations des chefs d’entreprise. Cette enquête, effectuée auprès des dirigeants de TPE – PME de 10 à 500 salariés, évalue leurs préoccupations et leurs besoins d’assurance. La dernière édition met en évidence une évolution sensible par rapport aux exercices précédents.
Pour nous éclairer, Antoinette Prost, Responsable des Etudes Marketing pour AXA France, nous présente les résultats du baromètre et nous partage ses réflexions.
Un des enseignements les plus étonnants est que le moral des chefs d’entreprise se porte bien. Pouvez-vous nous en dire plus ?
La réponse des chefs d’entreprise sur leur état d’esprit va à l’encontre des idées reçues. Au regard des difficultés rencontrées, on aurait pu penser que les chefs d’entreprise seraient, cette année, plus négatifs que précédemment sur l’activité et la situation économique de leur entreprise. Il n’en est rien, ce qui constitue une vraie bonne nouvelle !
En effet, la question que nous leur avons posée porte sur l’activité de leur entreprise. Depuis 2014, à l’exception de l’année 2020, leur perception de l’évolution de leur activité est majoritairement positive et progresse. Et en 2022, nous sommes au point le plus haut sur cet indicateur : le baromètre montre que pour 76% des dirigeants, leur entreprise se porte bien (ils n’étaient que 58% en 2014). Pour un nombre conséquent d’entreprises, les carnets de commande sont pleins. En revanche, le point d’achoppement repose sur leurs capacités à produire dans de bonnes conditions.
« On peut faire l’hypothèse que les difficultés récentes, et notamment la crise Covid, ont rendu les entreprises plus adaptables à la gestion d’un environnement complexe »
Dans un contexte évidemment très marqué par le conflit en Ukraine et ses conséquences économiques, les risques redoutés par les chefs d’entreprise sont d’abord l’inflation puis, on ne s’en étonnera pas, la dégradation de la conjoncture liée au conflit en Ukraine, qui préoccupe deux dirigeants sur trois, et enfin la reprise de la crise sanitaire.
De même, interrogés sur leurs difficultés, les chefs d’entreprises sont 87% à mentionner la hausse des prix (matières premières et énergie).
Mais, outre difficultés liées à la conjoncture internationale et à ses conséquences sur l’économie, les chefs d’entreprise témoignent d’une autre préoccupation très importante : les difficultés de recrutement, qu’ils sont nombreux à évoquer (84%) presque au même niveau que celles liées à la hausse des prix. Et ce phénomène touche tous les secteurs.
Vous venez de souligner que les difficultés de recrutement constituent l’une des principales préoccupations des chefs d’entreprise. N’est-ce pas l’occasion pour ces derniers de se pencher encore plus sur le bien-être au travail de leurs salariés ?
Bien sûr, le bien-être et la qualité de vie au travail deviennent des éléments fondamentaux d’attractivité et/ou de fidélisation. Les problèmes de recrutement sont clairement un frein à l’activité et constituent, pour les employeurs, un enjeu fort pour développer leurs marques employeur.
Dans les leviers existants, nous pouvons citer le recours au télétravail. La crise de la Covid a largement démocratisé cette pratique, encore mineure avant la crise sanitaire.
« A ce sujet, notre enquête montre que 44% des entreprises de 10 à 500 salariés offrent des possibilités de télétravail »
Et cette pratique du télétravail semble bien intégrée : parmi les entreprises qui l’ont mis en place, seul un quart seulement disent avoir du mal à maintenir leur productivité.
On relève d’ailleurs des indicateurs un peu plus positifs dans les entreprises qui ont recours au télétravail, et notamment un peu moins d’absentéisme. Signe que le télétravail semble plutôt aller de pair avec un meilleur climat interne ?
Outre l’instauration du télétravail, un peu plus du tiers des entreprises (37%) ont mis en place des mesures relatives à la Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT) et au bien-être des salariés.
Leurs actions dans ce domaine sont notamment :
- La formation aux troubles musculo-squelettiques (une entreprise sur deux parmi celles qui ont mis en place des actions)
- L’accès au sport (environ le quart des entreprises qui ont mis en place des actions)
- Des bilans de santé proposés aux salariés (environ un quart des 37%)
- Une offre de téléconsultation médicale (idem)
- La gestion du stress (idem)
C’est probablement une combinaison d’actions qui permettra de renforcer le bien-être en entreprise.
Concernant les attentes des chefs d’entreprise à l’égard de leurs assureurs, quels sont les points forts mis en avant par le baromètre ?
De manière assez logique, les attentes, les critères de choix d’un assureur les plus importants sont le niveau de garantie du contrat et la qualité du conseil.
Sur le marché de l’entreprise, le prix est bien sûr important, mais arrive loin après d’autres préoccupations majeures. Il intervient au 10ème rang, après ces aspects de qualité du contrat, mais aussi de confiance dans l’intermédiaire, de clarté de l’offre, de qualité de service… Lors de la crise de la Covid, la joignabilité et la clarté de l’offre ont pris davantage d’importance, mais retrouvent maintenant les niveaux constatés dans les précédentes vagues d’enquête.
En revanche, même si les esprits commencent à bouger, chacun constatant l’impact du changement climatique sur sa vie quotidienne, les critères environnementaux ne sont pas encore prioritaires dans les choix des contrats.
Justement sur le sujet environnemental, qu’avez-vous identifié ?
Concernant l’épargne des salariés, la notion d’investissement socialement responsable (ISR) suscite un intérêt grandissant.
« Même s’ils ne sont pas « primordiaux », les ISR constituent un critère important de choix d’un dispositif d’épargne salariale, pour la moitié des chefs d’entreprise » (40% Important et 9% Primordial) »
Autre chiffre qui parle de lui-même : 82% des entreprises disent avoir mis ou mettent en place des mesures de maîtrise de l’énergie.
On constate également que, en raison notamment de la guerre en Ukraine et des diverses difficultés d’approvisionnement, la notion de souveraineté économique prend davantage d’importance. Ainsi, une entreprise sur deux déclare vouloir donner (ou donne déjà) la priorité à des fournisseurs français ou européens, et plus de 40% souhaitent favoriser les circuits courts.
En conclusion, malgré les incertitudes économiques, le niveau de confiance et même de relatif optimisme mesuré en 2022 constitue indéniablement un atout pour le succès des entreprises françaises. Plusieurs difficultés majeures émaillent le chemin, et tout particulièrement le recrutement. Dans ce contexte, le bien-être des salariés peut constituer un pari gagnant à relever dans les prochains mois et années.
Enquête par téléphone, réalisée par l’institut KANTAR, auprès d’un échantillon de 500 dirigeants d’entreprises de 10 à 500 salariés en juin 2022.
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